• Géographie


    Le Dessous Des Cartes Des Nouvelles D'ethiopie... par APESOR

    Géographie physique 

    D'une superficie de 1 137 000 km², l'Éthiopie se situe entre 3 °N et 14 °N à équidistance de l'équateur et du tropique du Cancer. Située sur la partie africaine du grand rift, abritant la dépression de l'Afar au point de rencontre de trois plaques tectoniques et drainant les principaux cours d'eau de la corne de l'Afrique, l'Éthiopie dispose d'un environnement très diversifié.

    La topographie s'étend ainsi du désert du Danakil à 120 m sous le niveau de la mer aux sommets enneigés du mont Ras Dashan culminant à 4 543 m. Le relief du pays combinant hauts plateaux (notamment le plateau central situé à une altitude variant entre 1 800 et 3 000 m), massifs et canyons escarpés, régions volcaniques, savanes, zones désertiques et hautes plaines verdoyantes.

    Le pays a été exploré et cartographié de 1838 à 1848 par Antoine d'Abbadie d'Arrast.

    Formation géologique 

    Vue satellite de l'Éthiopie.

    À l'ère précambrienne, suite à la fracturation du supercontinent Rodinia (environ – 750 millions d'années), trois blocs principaux (le Gondwana oriental, le Gondwana central et le Gondwana occidental)[13] entrent en collision il y a 600 millions d'années ; des chaînes de montagnes colossales se forment à cette époque, constituant l'orogenèse panafricaine. Le socle précambrien protérozoïque (visible à Meqelé) se forme également durant la même période[14]. Durant 375 millions d'années, un processus d'érosion estompe ces monts pour laisser place à de basses plaines à la périphérie de l'Éthiopie[14]. À l'ère mésozoïque (250-70 millions d'années) une élévation du nord de l'Éthiopie se produit en parallèle d'un affaissement du Sud[14].

    C'est à l'ère oligocène (35 millions d'années) que se produit un évènement géologique majeur dessinant l'actuelle géologie éthiopienne : une élévation brutale de la plaque arabo-éthiopienne se produit sous l'effet de la montée d'une masse magmatique en fusion issue de points chauds situés entre 2 900 et 700 km de profondeur. La masse des matériaux, ainsi que la forte élévation de température à laquelle ils conduisent (100 à 300 °C) fragilisent puis provoque un effondrement de l'écorce terrestre. Trois fracturent apparaissent alors amenant pour deux d'entre elles à la mer Rouge et au golfe d'Aden, la troisième à la vallée du rift[14]. Suite à la rupture qui s'ensuit (certaines zones s'enfoncent à 120 m sous le niveau de la mer), la mer Rouge envahit la dépression formée au nord-est de l'Éthiopie. La continuation des éruptions volcaniques forme par la suite des digues basaltiques conduisant à la formation d'une mer intérieure[14].
    Celle-ci s'évapore progressivement laissant place de nos jours à des lits de sels de plusieurs kilomètres d'épaisseur et quelques lacs salés[14]. Les volcans toujours en activités, constituant la région d'Afrique où ils s'y trouve en plus grand nombre, les sources d'eau bouillonnantes et les geysers témoignent encore de nos jours de ces époques.

    Climats 

    Représentation des cinq principales zones climatiques en Éthiopie

    De par son positionnement en zone tropicale, son relief et sa proximité avec l'océan Indien, l'Éthiopie possède une large variété de climats. Globalement, seules les régions du Sud-Ouest disposent d'un climat de type tropical, les climats sur les autres zones étant influencés par l'altitude et la mousson de l'océan Indien[15].

    On distingue généralement six zones climatiques majeures sur l'ensemble du territoire :

    • alpine, au dessus de 3 800 m, la température y est en moyenne de 5 °C et le climat de type alpin
    • tempérée subalpine, jusqu'à 1 400 m, d'une température moyenne de 15 °C
    • tropicale, entre de 500 m et 1 000 m d'altitude, d'une température moyenne de 30 °C
    • tropical de savane, entre 100 m et 1 400 m d'altitude,
    • semi-désertique entre 100 m et 800 m d'altitude, le climat est semi-aride dans ces deux zones
    • désertique entre -130 m et 100 m d'altitude, le climat y est de type aride et la température moyenne atteignant les 40 °C[15].

    Les plateaux du Nord et le Choa central, qui constituent le cœur de l'Éthiopie historique, sont soumis à des précipitations abondantes (moyenne annuelle supérieure à 1 000 mm) durant la mousson d'été (fin juin à fin septembre), suivi d'une saison sèche jusqu'en février. La mousson pénètre le pays par le sud-ouest avant de précipiter à la rencontre des hauts-plateaux, épargnant ainsi les plaines du Danakil sur le versant est au climat aride[15].

    Du fait du relief du pays les basses terres à l'Est et au Sud-Est sont ainsi généralement soumises à des climats plus arides que les hauts plateaux. La région de l'Ogaden au Sud-Est bénéficie de précipitations plus faibles au printemps et en automne, le climat y est de type semi-désertique (moyenne annuelle entre 50 et 300 mm seulement)[15]. Les régions du Sud et du Sud-Ouest du pays sont moins sensibles à la mousson. Le climat y est de type tropical, les pluies y sont intermittentes et l'humidité élevée[15].

    Végétation 

    L'Éthiopie dispose d'une végétation extrêmement diversifiée du fait de la grande variété de climats et de reliefs au sein du pays. La région éthiopienne constitue à cet égard l'un des huit « centres de diversité » (en) identifiés à travers le monde par le biologiste Nikolaï Vavilov, c'est-à-dire de régions du globe ou l'on trouve un très forte diversité génétique d'espèces particulières qui puisse être identifié comme le centre d'origine de cette espèce. La diversité est telle qu'on y découvre encore de nos jours de nouvelles espèces[16]. Dans les régions de très hautes altitudes (au dessus de 3 800 m) seul subsiste une végétation de type alpin (lichen, bruyère). Plusieurs plantes sont caractéristiques de ces régions, notamment la lobélie géante.

    Dans les régions des hauts plateaux (2 400 m-3 800 m), le climat est plus tempéré, et le sol plus riche. C'est dans ses régions qui constituent le cœur historique de l'Éthiopie que l'on trouve encore aujourd'hui la majeure partie de l'exploitation agricole (teff, sorgho, maïs), tout autant que les forêts éthiopiennes largement soumise à une déforestation progressive.

    Le long de la frontières soudanaise à l'ouest, le climat tropical et les précipitations abondantes conduisent à une végétation luxuriante, particulièrement le long des fleuves. Dans les régions de plus basses altitudes au sud-ouest, le climat plus sec contribue à développer un environnement de type savane (herbes hautes, arbustes) ainsi que des plantes résistant à des conditions climatiques plus extrêmes (plantes succulentes). Enfin dans les régions désertiques périphériques, le climat aride et les précipitations quasi-inexistantes contribuent à développer une végétation xérophytique ou à la vie très courte, avec une végétation plus faible (acacias, palmiers) autour des quelques cours d'eau.

    Faune

    Babouin gelada dans la vallée du Nil bleu

    On dénombre en Éthiopie un nombre important d'espèces endémiques tout aussi bien chez les mammifères que chez les oiseaux qui constituent la faune éthiopienne. La biodiversité des espèces est notamment due à l'implantation de l'activité humaine à des zones assez délimités.

    À cet égard il est possible de distinguer les massifs montagneux des basses terres périphériques. Sur les haut plateaux, la présence humaine a au cours de l'histoire modifié l'environnement par sa pratique agricole sédentaire ; certaines régions au relief escarpé ont elles été naturellement protégées, c'est le cas notamment du massif du Simien, qui constitue aujourd'hui un parc naturel où prospère de nombreuses espèces endémiques (notamment le bouquetin walia (Capra walie), le loup d'Abyssinie (Canis simensis) , le nyala de montagne (Tragelaphus buxtoni), le corbeau corbivau (Corvus crassirostris) , le babouin gelada).

    Les pratiques nomades dans les basses terres privilégiant l'élevage ont eu beaucoup moins d'impact sur son environnement. On dénombre aujourd'hui neuf parcs nationaux, trois sanctuaires et huit réserves sauvages sur l'ensemble du territoire.

    Géographie administrative 

    Depuis l'entrée en vigeur de la constitution éthiopienne de 1994, l'Éthiopie repose sur un système fédéral et est divisée en neuf régions et deux « villes-régions » indiquées par des astérisques[c 2] :

    1. Addis-Abeba*  
    Afar Amhara Benishangul-Gumaz Gambela Oromia Oromia Oromia Somali Somali Région des nations, nationalités et peuples du Sud Tigré Addis-Abeba Dire Dawa Région Harar
    Régions et villes-régions d'Éthiopie. Cliquer sur l'image pour accéder au descriptif de la région.
    2. Afar Et afaria.png
    3. Amhara Et amhara.png
    4. Benishangul-Gumaz Et benishangul.png
    5. Dire Dawa*  
    6. Gambela Et gambella.svg
    7. Région Harar Et harrar.png
    8. Oromia Et oromo.png
    9. Somali Regió Somali1.jpg
    10. Région des nations, nationalités et peuples du Sud Et southern.png
    11. Tigré Et tigray.png
    Zones administratives de l'Éthiopie.

    Chacune des régions dispose de son propre gouvernement et d'un droit constitutionnel à l'autodétermination et à la sécession[c 3]. Ces dispositions, bien que théoriques, marquent la fin du processus de centralisation ayant commencé sous Téwodros II. Elles reflètent la nature des mouvements ayant combattu le gouvernement central durant la guerre civile de 1974 à 1991, essentiellement régionalistes, nationalistes, autonomistes voire indépendantistes.

    Les régions administratives remplacent depuis 1994 l'ancien système des provinces établi par Haile Selassié I. Leurs noms sont parfois encore employés de nos jours pour désigner un lieu dans le pays. Ces régions sont divisées à leur tour en 68 zones administratives sur l'ensemble du territoire. Le pays est en outre subdivisé en 550 woredas et six woredas spéciaux. Il s'agit en fait de l'équivalent d'un canton ou d'un district. Les woredas sont elles-mêmes divisées en kébélés qui représente une municipalité ou un quartier.

    Le peuple et sa culture 

    Démographie

    Données générales 

    Densités de population en Éthiopie
    Évolution démographique entre 1961 et 2003 (chiffres de la FAO, 2005). Population en milliers d'habitants.

    En juillet 2009, selon les estimations du World Factbook[17] l'Éthiopie comptait une population de 85 237 338 habitants ce qui lui vaut la 14e place mondiale et la deuxième en Afrique.

    Le pays a connu une évolution croissante et régulière de sa démographie jusqu'au début des années 1980. Par la suite cette croissance s'est accélérée jusqu'à aujourd'hui avec un taux moyen de 2,3% par an, à l'exception d'une baisse visible entre 1992 et 1993 due à l'indépendance de l'Érythrée, le 24 mai 1993 dont la population avoisinait à l'époque 3,2 millions de personnes. La population éthiopienne reste majoritairement jeune et rurale ; elle habite les zones des hauts plateaux.

    Indicateurs synthétiques[modifier]

    Cette section regroupe les principaux indicateurs démographiques :

    Structure de la population de l'Éthiopie
    Pyramide des âges de l'Éthiopie, 2005
    Population 85 237 338 habitants
    Densité de la population  hab./km²
    Taux de croissance de la population 3,208 %
    Âge médian (population totale)
     - Hommes
     - Femmes
    16,9 ans
    16,6 ans
    17,2 ans
    Structure par âge
     - 0-14 ans
     - 15-64 ans
     - 65 ans et plus

    46,1 %
    51,2 %
    2,7 %
    Rapport de masculinité (population totale)
     - À la naissance
    - Moins de 15 ans
    - 15-64 ans
    - 65 ans et plus
    0,97 homme/femme
    1,03 homme/femme
    1,00 homme/femme
    0,96 homme/femme
    0,75 homme/femme
    Part de la population urbaine 17 %
    Sources: The World Factbook, CIA (2009)[17];
    Mortalité en Éthiopie
    Taux brut de mortalité 11,55 
    Taux de mortalité infantile (population totale)
    - Hommes
    - Femmes
    80,8 
    92,06 
    69,2 
    Espérance de vie à la naissance (population totale)
     - Hommes
     - Femmes
    55,41 ans
    52,92 ans
    57,97 ans
    Source: The World Factbook, CIA (2009)[17]

     

    Natalité en Éthiopie
    Taux brut de natalité 43,66 
    Indice synthétique de fécondité 6,12 enfant(s)/femme
    Source: The World Factbook, CIA (2009)[17]
    Autres indicateurs sociaux
     en Éthiopie
     
    Taux d'alphabétisation (population totale)
    - Hommes
    - Femmes
    42,7 %
    50,3 %
    35,1 (est. 2003) %
    Nombre moyen d'années passées à l'école 8 ans
    Taux de séropositivité au VIH/SIDA
    (chez les adultes)
    4,4 %
    Taux d'accès à l'eau potable 42 %
    Taux de chômage N/D %
    Sources: The World Factbook, CIA (2009)[17]; ONU (2009)[18],[19]
    Plus grandes villes (2006)
     
    Addis Abeba 2 973 004
    Dire Dawa 281 750
    Nazreth (Région Oromia) 228 623
    Gondar (Région Amhara) 194 773
    Mekelé (Région Tigré) 169 207

     

    Langues et populations

    Langues d'Éthiopie

    Représentation schématique de la répartition des quatre principales langues éthiopiennes

    L'Éthiopie possède six langues principales : amharique (32,75%), oromo (31,6%), tigrinya (6,1%), somali (6,0%), guaragigna (3,5%) et sidama (3,5%, mais aussi de nombreuses autres*.

    En raison de l'« impressionnante »[20] concentration de langues très diverses, l'Éthiopie est considérée comme un « paradis pour linguistes »[20]. Les langues du pays peuvent être rattachées à quatre branches principales[21] :

    Les trois premières branches appartiennent à la famille des langues afro-asiatiques tandis que la quatrième appartient à celle des langues nilo-sahariennes. Quelques langues restent encore non classifiées. On dénombre au total environ 80 langues sur l'ensemble du territoire dont certains ont moins de 10 000 membres. Toutes les langues d'Éthiopie jouissent du même statut depuis l'entrée en vigueur de la constitution de 1994, son article 5 garantit « égale reconnaissance de l'État ». Le texte constitutionnel garantit à tous les peuples le droit de développer leur langue et de l'établir comme langue maternelle à l'école primaire.

    Un passage de la Genèse écrit en ge'ez, une langue utilisant le système d'écriture national.

    Les langues sémitiques sont principalement parlées dans les régions des hauts plateaux, dans le centre et le Nord du pays. Elles dérivent du ge'ez, langue du royaume d'Aksoum d'importance nationale jusqu'à l'émergence de l'amharique au XIIIe siècle[22]. Parlée de nos jours par une minorité de la population, elle constitue la langue liturgique de l'Église éthiopienne orthodoxe[22]. Les deux principales langues sémitiques d'Éthiopie sont l'amharique et le tigrinya. La première est la plus pratiquée du pays par environ 32,7 % de la population[17], principalement dans le Nord central éthiopien. Langue nationale depuis le règne de Téwodros II (1855 - 1868)[h 39], elle perd son statut officiel en 1995, avec l'adoption de la nouvelle Constitution[Note 6]. La deuxième principale langue sémitique est le tigrinya, parlée par 6,1 %[17] de la population, essentiellement dans le Tigré. Parmi les autres langues sémitiques, on peut citer le hareri, l'argobba ou le gouragué, parlée par 4,3% de la population[17],[22].
    Les langues sémitiques d'Éthiopie ont la particularité d'utiliser le système d'écriture ge'ez, un alphasyllabaire dit « éthiopique » et localement appelé fidel (ፊደል). L'Éthiopie est, avec l'Érythrée, l'unique pays au monde utilisant ce système d'écriture. Il comprend 182 caractères basiques auxquels il faut ajouter les caractères spéciaux, totalisant plus de 200 signes[23].

    Les langues couchitiques sont essentiellement parlées dans une partie du sud-ouest et du centre ainsi que dans l'est du pays, dans la vallée de l'Awash et le triangle Afar. La plus importante est l'afaan oromoo, deuxième langue du pays, parlée par 31,6 %[17] de la population, très majoritairement les peuples oromos[22]. Le somali, quatrième langue du pays, est pratiquée par 6 %[17] de la population, principalement les Somalis de l'Ogaden, dans l'est éthiopien[22]. L'afar est quant à lui parlé dans le Nord-Est, une région où est également pratiquée le saho[21]. Enfin, parmi les principales langues couchitiques d'Éthiopie, il convient de citer le sidama, pratiquée par 3,5% de la population[17] et regroupée au sein du groupe oriental des hautes terres avec le burji[21].

    Les langues omotiques sont propres à l'Éthiopie où elles sont parlées par les populations vivant dans le bassin de l'Omo, dans le sud-ouest du pays[24]. Bien que leur nombre précis soit difficilement évaluable, on estime à plus de 40[24] les langues de cette branche. Si très peu de personnes parlent une langue omotique, leur faible diffusion géographique n'empêche pas une grande hétérogénéité[24]. Parmi cette branche, on peut citer le gamo, le yemsa ou le gimira.

    La branche nilotique constitue la branche des langues éthiopiennes les moins parlées[24]. Elles sont pratiquées par des populations du sud-ouest, à la frontière avec le Soudan. Le faible nombre de locuteurs et leur éloignement géographique en font un groupe linguistique relativement peu connu et étudié d'Éthiopie[24]. L'ensemble des langues nilotiques en Éthiopie comprend : le nuer-dinka et l'anyua.

    Région à fréquenter

    Géographie

    Peuples d'Éthiopie

    Les peuples d'Éthiopie peuvent être divisé en divers grands ensembles avec comme élément caractéristique essentiel, la langue. Le premier grand groupe est constitué des peuples habesha[p 4] parlant essentiellement des langues sémitiques. Le peuple amhara est le plus important démographiquement et le deuxième au niveau national après les Oromos. Ils habitent les hauts plateaux et sont des agriculteurs[p 4]. À partir de la moitié du XIXe siècle et notamment sous le règne de Menelik II, ils jouent un rôle important dans la construction de l'État moderne éthiopien[p 4]. Ils parlent l'amharique[p 4], aujourd'hui langue de travail du gouvernement fédéral et sont des chrétiens orthodoxes. Les Tigrés constituent démographiquement le deuxième peuple du groupe habesha. Leur langue est le tigrinya et ils sont également des chrétiens orthodoxes. Ils sont installés dans le nord de l'Éthiopie et se sentent par conséquent fortement liés à l'héritage aksoumite ainsi qu'à l'identité nationale éthiopienne[p 4]. Les autres populations habesha sont les Agew et les Béte Esraél[p 5].

    Une deuxième entité est constituée par les Oromos, premier peuple du pays devant les Amharas. Auparavant, ils ont été désignés par le terme de « Gallas », un mot ayant aujourd'hui une connotation péjorative[p 6]. L'« identité élastique »[p 7] s'explique par l'étendue de la zone de peuplement allant de la frontière avec le Soudan à l'ouest, à l'Ogaden, à l'est et à la frontière avec le Kenya, au sud. Leurs activités varient selon les régions mais l'élevage bovin est partagée par les divers groupes oromos[p 7]. En effet, ils détiennent une partie importante du cheptel national[p 7]. Contrairement aux Amharas et aux Tigrés, les Oromos n'ont pas d'unité religieuse, une partie pratique le christianisme orthodoxe éthiopien, une autre fraction est musulmane tandis qu'une portion est protestante. En revanche, la langue oromo constitue un ciment unificateur ; les divers dialectes oromos sont intercompréhensibles[p 6]. L'intégration politique des Oromos dans la société et l'État éthiopiens s'est effectuée du XVIe au XVIIIe, après l'invasion de Gragne et à la suite des mouvements d'immigration[p 6]. Plusieurs groupes de populations constituent l'ensemble oromo tels que les Borenas, les Arsi et les Gujis, etc.[p 6].

    Dans l'Est éthiopien, vivent deux peuples de pasteurs : les Afars et les Somalis. Majoritairement musulmans, ils parlent respectivement l'afar et le somali. Près de 1 à 1 5 million d'Afars vivent dans le Nord-Est de l'Éthiopie, tandis que les 4 millions de Somalis sont installés dans la région de l'Ogaden[p 8]. Les deux peuples sont nomades et organisés en clans bien qu'historiquement, ils ont pu constituer des États stables[p 9].

    Enfin, tout un ensemble de peuples vit dans le Sud-Ouest, et dans les périphéries Ouest et Sud de l'État éthiopien. Gérard Prunier dégage deux groupes. Tout d'abord, la « première périphérie sud-ouest »[p 10], proche du centre, dans laquelle vivent entre autres les Gurages, les Kaffas, les Sidamas, les Welaytas, etc.[p 10]. Le deuxième groupe est celui des « grandes périphéries »[p 11]. Ces populations vivent, dans le sud et aux frontières avec le Soudan et le Kenya, d'après les termes de Prunier une relative « indifférence »[p 11] du pouvoir central. Chaque peuple est démographiquement peu important mais ce vaste ensemble regroupe des cultures véritablement homogènes, des langues différentes et des organisations sociétales diverses[p 11].

    Religions 

    La liberté de culte est garantie en Éthiopie par la constitution de 1994, spécifiant l'absence de religion d'État. Il y est ainsi interdit de créer un parti politique fondé sur la religion, tout groupe religieux doit être déclaré et enregistré auprès des autorités gouvernementales.

    Christianisme

    Prêtre de l'église Yemrehanna Krestos.

    Le christianisme en Éthiopie est dominé par l'Église éthiopienne orthodoxe, qui est majoritairement répartie dans les régions des hauts plateaux (capitale-région: Addis-Abeba, régions Amhara et Tigré).

    Selon le recensement national officiel de 2007, la population chrétienne se répartit suivant trois courants[25] :

    Le christianisme est introduit en Éthiopie vers 330 lorsque Saint Frumence de Tyr, appelé localement Fremnatos ou Abba Selama (« père de la Paix »), convertit le roi Ezana d'Aksoum, en faisant ainsi l'un des plus ancien État chrétien au monde, le second après l'Arménie. La croix remplace à cette époque la symbolique du Soleil et de la Lune sur les pièces du royaume. Vers 480, un groupe de moines, les Neuf Saints introduisent le monachisme et le monophysisme, sous la forme d'un refus des formulations du concile de Chalcédoine de 451, adhérant à la nature unique du Christ. Ceux-ci contribuent à la diffusion du christianisme dans le royaume en traduisant notamment les premiers textes religieux en ge'ez]. Les monastères, l'architecture à travers des églises rupestres de Lalibela notamment, l'art, la peinture, la littérature, témoignent de l'influence sensible du christianisme orthodoxe tout au long de l'histoire de l'Éthiopie et du règnes des dynasties Zagwe et salomonienne. La tentative d'introduire le christianisme romain en Éthiopie par la voix de missionnaires se révèle par ailleurs être un échec conduisant à une guerre civile se concluant par l'expulsion des jésuites sous Fazilidas.

    Jusqu'en 1959, l'Église éthiopienne orthodoxe fait partie de l'Église copte orthodoxe, date à partir de laquelle elle devient autocéphale. Elle constitue la seule Église orthodoxe précoloniale de l'Afrique subsaharienne. Elle sera une religion d'État jusqu'en 1974 date du renversement de la dynastie salomonienne et de la révolution éthiopienne.

    Islam

    La ville de Harar, patrimoine mondial de l'Unesco

    Selon le recensement national officiel de 2007, l'islam serait pratiqué par environ 33,9 % de la population éthiopienne[25].

    Celui-ci est surtout présent aujourd'hui dans les basses plaines plus chaudes du Sud et de l'Est, dans les régions de Harar, Afar et Somali) ainsi que dans certaines parties du sud de la région Oromia. L'Islam suit généralement la tradition sunnite.

    La présence de l'Islam en Éthiopie remonte à l'époque de la fondation de la religion musulmane et à l'hégire. Vers 615, un groupe de musulman dirigé par Mahomet, fuit les persécutions dont ils sont l'objet à la Mecque, et trouve refuge en Éthiopie dirigée alors par le roi chrétien nommé Ashama ibn Abjar dans la tradition arabe. L'un des compagnons de Mahomet, le premier muezzin Bilal, est également décrit comme originaire d'Éthiopie. Ceux-là s'installent à Negash, dans le Tigré, considéré comme le premier lieu d'implantation de l'islam en Éthiopie. En échange de la protection accordée par le roi face aux injonctions des Quraych qui demandent leur retour en Arabie, Mahomet demande à ses compagnons de respecter, et de vivre en paix avec les chrétiens d'Éthiopie. Un cimetière remontant au VIIe siècle a depuis été retrouvé dans la région de Negash. La région éthiopienne est ainsi l'endroit où l'on retrouve certains des plus anciens sultanats au monde, parmi ceux-là celui de Shoa fondé par la dynastie Makhzumite en 896, remplacé plus tard par le sultanat d'Ifat.

    Cimétière musulman à l'extérieur des fortification de Harar

    L'islam s'est par la suite développé dans les régions commerçantes côtières du Sud de la Corne de l'Afrique, suivant ainsi les routes maritimes, particulièrement dans la région Somali. Les campagnes du somali Ahmed Gragne vers les hauts plateaux à partir de 1527 contribuent également à son expansion dans le sud de l'Éthiopie. L'expansion des Oromos de tradition Waaqa vers le nord dans les décennies qui suivent affaiblit un temps son influence, avant que celui-ci n'adoptent progressivement la nouvelle religion. Aujourd'hui la religion musulmane est pratiquée par environ 40% des Oromos sous forme de syncrétisme entre islam et anciennes croyances.

    La ville de Harer, abritant 82 mosquées, dont trois remontant au XXe siècle et 102 tombeaux est aujourd'hui considérée comme la quatrième ville sainte de l'islam par les musulmans éthiopiens. Harer est également patrimoine mondial de l'Unesco.

    Judaïsme[modifier]

    Article détaillé : Falashas.

    L'origine des Beta Israël (ge'ez : ቤተ እስራኤል) reste mal comprise, leur croyance coexistait probablement avec les animistes avant l'arrivée du christianisme. Depuis l'antiquité éthiopienne ils vivent dans le nord du pays, en particulier les provinces de Gondar et du Tegré. Après avoir bénéficié de petits États indépendants jusqu'au XVIIe siècle, ceux-ci sont conquis par l'Empire d'Éthiopie, et les Bete Esraél deviennent une minorité marginalisée.

    Les pratiques religieuses des Falashas d'Éthiopie sont basées sur la même version du Pentateuque que celle qu'utilisaient les chrétiens éthiopiens, rédigée en ge'ez. Toute la littérature rabbinique, en particulier le Talmud, est ignorée. Les communautés Beta Israel n'ont pas eu de synagogues ni de rabbins, au niveau de la symbolique, ils n'utilisent pas l'étoile de David, celle-ci étant un symbole de la royauté éthiopienne. Leur lieu de culte est appelé masgid[Note 7]. On y lit la Bible, et on y sacrifie l'agneau pascal.

    Ils rentrent en contact avec la version occidentale du judaïsme à la fin du XIXe siècle. À compter du début du XXe siècle, une redéfinition en profondeur de l'identité de la communauté se fait jour et l'amène à se considérer désormais comme juive, et plus seulement comme Béte Esraél, notamment depuis les opérations de rapatriement en Israël. Cette évolution réduit progressivement les forts particularismes religieux originels et rapproche la religion des Beta Israel du judaïsme orthodoxe. Depuis leurs pratiques séculaires n'ont cessé de régresser au profit des pratiques du judaïsme rabbinique, mais sans disparaître. On compte en 2009, 3 188 Falashas en Éthiopie, alors qu'ils sont plus de 100 000 en Israël.

    Arts et culture

    En raison du maintien de son indépendance et suite à la mauvaises expérience catholique au XVIIe siècle[Note 8], l'art éthiopien n'est que peu influencé par le monde occidental[p 12]. En revanche, sa proximité avec le monde byzantin est perceptible dans l'art chrétien. Avant les années 1990, l'art éthiopien est relativement peu connu du grand public occidental[p 12]. La première étude européenne date de 1892 et la première expédition archéolique s'est effectuée en 1906[p 13]. De nombreuses collections privées et des librairies ont gardé inconnu l'art éthiopien. Sa reconnaissance internationale débute en 1960, avec la publication par l'UNESCO d'enluminures, progressivement des expositions sont organisées dans différentes villes, à Addis-Abeba, Paris ou encore Baltimore[p 13]. L'aspect le plus connu demeure l'art chrétien, tandis que l'artisanat n'est que peu étudié[p 14].

    L'art chrétien éthiopien

    Croix de procession

    Christianisée dès le IVe siècle puis coupée du reste du monde chrétien suite à l'expansion de l'islam à partir du VIIe, l'Éthiopie a développé une tradition religieuse mais également un art chrétien original. Celui-ci s'exprime sous trois formes principales : l'architecture, l'orfèvrerie et la peinture[p 15]. L'architecture chrétienne est partiellement influencée par la civilisation aksoumite ; les premiers monuments taillés dans la roche datent du VIIe-Xe[p 15]. Ils apparaissent tout d'abord dans la province du Tegré où, aux Xe-XIIe, est creusée une grande église funéraire à plan cruciforme dédiée aux souverains Abreha et Atsbeha. L'ensemble le plus célèbre reste celui de LalibelaGebre Mesqel fait tailler au XIIIe les premières églises monolithes[p 15]. Quand elles ne sont pas taillées dans la roche, les églises éthiopiennes ont souvent une forme octogonale. L'intérieur des édifices religieux sont parfois décorés et c'est principalement dans ce domaine que la peinture éthiopienne s'est développée, influencée par l'art byzantin[p 16].

    Les plus vielles peintures chrétiennes conservées sont des enluminures datant, environ, du VIIe ; les contacts entre le royaume d'Aksoum et le Moyen-Orient sont perceptibles à travers le style des œuvres[p 17]. L'isolement du pays par rapport au reste du monde chrétien est visible dans les peintures des XIIe-XVe durant lesquels un véritable style éthiopien se développe. La première école picturale originale éthiopienne apparaît vers 1400, les peintres illustrent principalement des manuscrits[p 17]. Outre l'architecture et la peinture, on retrouve un art des croix qui constitue « probablement la part la plus originale de l'art chrétien éthiopien »[p 18], note Jacques Mercier, historien de l'art. Cette orfèvrerie serait apparue durant les siècles de christianisation du pays, durant les Ve-VIe pour véritablement prospérer dès les Xe-XIIe. Les gravures sont géométriques, les sculptures anthropomorphes sont absentes et le Christ est parfois représenté[p 16]. La diversité des styles, des tailles et des matériaux permet de retrouver des formes originales par rapports aux arts d'autres chrétientés[p 18].

    Artisanat et art corporel

    Le bouclier, un objet de guerre souvent travaillé par les artisans éthiopiens.

    Contrairement à l'art chrétien, les objets artisanaux de la vie quotidienne conservés ne dépassent pas 200 ans[p 14]. Les différents artisanats se sont développés en fonction des aires culturelles, définies par rapport aux systèmes agraires. Ainsi dans le Sud-Ouest, notamment dans l'aire horticole, on retrouve du mobilier monoxyle, des tables et des sièges, ceux-ci étant particulièrement travaillés[p 14]. La culture régionale du café explique le développement d'un artisanat prévu à cet effet, comme les plateaux recevant des tasses ou encore les cafetières. L'appuie-tête constitue un objet important de l'artisanat éthiopien ; son usage s'est répandu du sud vers le nord à partir du XVIIe[p 14]. Ils sont souvent monoxyles mais peuvent être constitués de deux pièces.

    La poterie, d'une « extraordinaire diversité »[p 14], est de grande qualité surtout dans les régions du Tegré, du Harer, de l'Illubabor, du Welayta et du Gayent[p 14]. La bijouterie est toute aussi diverse, les Argobbas du Harerr ayant développé dans ce domaine un artisanat original. Toujours dans le Harer, on retrouve des vanneries colorées décorant l'intérieur de certaines maisons de la capitale régionale[p 15]. Dans le passé, l'artisanat a touché l'armée puisque bouclier et matériel de guerre ont été travaillés. Dans le nord, les boucliers sont renforcés et décorés par des plaques en métal embossées[p 15].
    Enfin, l'art éthiopien est également corporel. Au XVIIe siècle, les chrétiennes donnent une grande importance à leur coiffure[p 15] ; de nos jours, les femmes du Tegré portent une coiffure bien distincte. Dans le sud, outre les coiffures d'argile des Nyangatom, on retrouve les perruques des Oromos, parmi les plus célèbres, celles de la région de Jimma[p 15]. Les tatouages sont également développés. Ils sont relativement discrets dans les populations rurales chrétiennes où les femmes se font parfois tatouer une croix sur le front. En revanche, ils sont bien plus visibles chez les Mursis qui se tatouent une partie importante du corps[p 15].

    Littérature et philosophie 

    De par l'existence de son système d'écriture ge'ez, l'Éthiopie entretient une tradition littéraire ancienne remontant à son antiquité aksoumite. On distingue généralement deux périodes majeures dans la littérature éthiopienne correspondant à la littérature ge'ez, aujourd'hui langue morte conservée comme langue liturgique, et à la littérature amharique. À leur côté subsiste également une littérature musulmane apparue pendant le XVIe siècle ; et quelques livres spécifiques Juifs d'Éthiopie, comme le Te'ezaza Sanbat (Ordonnance du Sabbat).

    Littérature ge'ez 
    Eliza Codex (Hill Museum)

    Durant l'Antiquité éthiopienne, le ge'ez est une langue vivante, le grec est également parlé à la cour. Les premières inscriptions connues font état des campagnes royales, l'inscription d'Ezana constitue à cet égard la première historiographie officielle en Éthiopie. La Bible est traduite au Ve siècle à partir du grec ; le canon de la Bible éthiopienne contient plusieurs livres considérés comme apocryphes par d'autres Églises chrétiennes. De nombreux textes, comme le Qerillos (Cyrille), les Règles monastiques de saint Pacôme, Le Fisalgwos (« Le Physiologue ») et "bie'afe Mikaél" (« le livre des philosophes »)[26], sont traduit tout en faisant simultanément l'objet, selon Claude Sumner (en), d'enrichissements typiquement éthiopiens.

    À partir du XIIIe siècle, la puissance d'Axoum s'affaiblit et le ge'ez s'impose progressivement comme une langue savante de l'écrit face à l'amharique au cours de la période de la dynastie solomonide. Cette période marque le début d'une période intense de productivité littéraire ge'ez. La théologie et les pensées religieuses influencent les écrits. Les vies de saints et les récits de miracle sont nombreux. Parmi ces écrits ont peut relever notamment le Kebre Negest rédigé vers 1314 au cours du règne d'Amda Tsion (1314-1344), un des ouvrages majeurs de la littérature éthiopienne, évoquant la fondation de la dynastie salomonide, le règne de David Ier (1382-1413) , ou encore celui de Zara Yacoub (1434-1468) auteur d'ouvrages principalement théologique dont le plus célèbre reste « le Livre de la Lumière ».

    Bible éthiopienne (Oregon Museum)

    De nouveaux genres poétiques apparaissent : les qenés, les deggwas (recueil d'hymnes religieux) mais aussi les malkes (portrait d'une personne chantée), généralement des stances, avec des rimes, d'environ 55 lignes, chacune adressée à un attribut moral ou physique du saint décrit.

    Durant le XVIe siècle, la philosophie écrite nationale, qui s'étend sur douze siècles de production littéraire[26], se développe sous forme d'œuvres uniquement éthiopiennes, notamment La Vie et les maximes de Skendes, le Traité de Zera yacob (Hatata) ainsi que celui de son élève Walda Heymat. Dans son traité écrit au XVIIe siècle, Zara Yacoub développe notamment une philosophie rationaliste, en adoptant une positionnement critique sur le discours religieux soulignant le rôle de la Raison[27]. Au cours du XVIIe siècle, les genres culturels éthiopiens, dont la poésie, la musique et à la danse vivent une phase d'intense développement[28].

    Littérature amharique 

    La littérature amharique apparaît dès le XIIIe siècle, au cours de la dynastie Zagwe, sous forme de courts chants royaux, des paraphrases, des psautiers ainsi que quelques traités théologiques. Cependant, ce n'est que sous le règne de Tewodros II (1855-1868) qu'elle se développe avec les chroniques royales, premières chroniques entièrement en amharique[29].

    La traduction du Voyage du pèlerin de John Bunyan en 1892 ouvre la voie à un nouveau genre : la nouvelle allégorique, souvent partiellement en vers, la première est Lebb wellad tarik (1908) de Afeworq Gebre Eyesus. Il sera également l'auteur d'ouvrages didactiques et d'une « Vie de Menelik II ». Plus tard, Hiruy Walde Selassie devient le principal écrivain de la littérature amharique sous la régence de Teferi Mekonnen (1916-1920). Il est l'auteur de biographies de recueils de poésies, de récits historiques et d'essais. Parmi les écrivains du XXe siècle, on peut citer notamment Makonnen Endalkatchew, Kebbede Mikael, Mengistu Lemma, Tadesse Liban, Alemayehu Mogas et Tekle Tsodeq Makuria.

    Certains auteurs éthiopiens célèbres pour leurs œuvres en amharique ont aussi publié des romans, pièces de théâtres et poèmes en langue anglaise. C'est la cas notamment, pour le plus célèbre d'entre eux, de Tsegaye Gabre-Medhin[30] qui, à 29 ans, reçoit le prix Haile Selassie I de littérature amharique.

    Musique 

     

    La musique éthiopienne est extrêmement diversifiée, chacun des 80 peuples du pays possédant ses propres particularités. Les influences sont multiples et incluent la liturgie chrétienne et musulmane ainsi que la musique populaire des pays situés dans la Corne de l'Afrique, somalienne et soudanaise en particulier. La musique éthiopienne utilise souvent un système modal unique pentatonique, caractérisé par des intervalles prolongés entre certaines notes.

    La musique des hauts plateaux utilise un mode unique appelé qenet, basé sur quatre modes principaux : tezeta, bati, ambassel, et anchihoy[31]. Trois modes supplémentaires peuvent être considérés comme des variations : tezeta mineur, bati majeur et bati mineur.

    Mulatu Astatke, créateur de l'éthio-jazz

    Certains morceaux prennent le nom de leur qenet, tel que le tezeta, un chant de nostalgie. Accompagné d'instruments traditionnels, ces modes sont généralement non tempérés[Note 9], mais joués sur des instruments occidentaux tels que piano et guitare ils utilisent le système d'accord tempéré occidental. La musique des hauts plateaux est généralement homophonique ou hétérophonique[31]. En dehors, certaines sont polyphoniques.

    Les principaux instruments traditionnels sont masenqo (luth), krar (lyre), washint (flûte), begena (harpe), kebero (double tambour), cistree et tom (chez les Anuaks). Dans la tradition populaire, l’azmari, chanteur et musicien éthiopien, homme ou femme, sont doués pour chanter des vers en s'accompagnant d'une masenqo ou d'une krar. La musique moderne éthiopienne laisse également une part importante à l'éthio-jazz, à travers son créateur Mulatu Astatke, et des musiciens comme le saxophoniste Getatchew Mekurya. Certains musiciens populaires connus sont Mahmoud Ahmed, Gigi Shibabaw, Teddy Afro, Tilahun Gèssèssè, Aster Aweke, Alèmayèhu Eshèté, Neway Debebe, Asnatqèch Wèrqu et Ali Birra. À la fin des années 1990, le label français Buda Musique a réédité les plus grandes voix de l'éthio-jazz avec la collection Éthiopiques permettant la redécouverte, pour les occidentaux, du groove de la corne de l'Afrique.

    Cuisine 

    L'injera est recouverte de divers plats dont le doro wat, au centre et à gauche, et le tebs

    La cuisine éthiopienne se caractérise par l'usage de l'injera, une galette levée à base de teff qui sert à la fois de couverts et de récipient[32]. L'injera est disposée sur une vaste assiette afin d'y placer les divers ragoût, sauces et légumes. Traditionnellement, le plat est placé sur un messob, une sorte de table ronde faite de paille, afin que la nourriture puisse être partagée en commun[32]. La variété des climats éthiopiens permet de faire pousser un grand nombre de légumes et de féculents : le millet, du maïs, de l'orge, des lentilles, des pois cassés ou encore de la coriandre, qui constituent autant d'élément de base pour les différentes sauces accompagnant l'injera. Ces plats végétariens sont particulièrement consommés lors des jeûnes, strictement respectés par les chrétiens orthodoxes[32].

    La sauce la plus courante est le wet, accompagnée d'oignons rouges, de niter kibbeh et assaisonné de bérbéré. Ce dernier est un des ingrédients principaux contenant du piment rouge. Son nom s'applique aussi à un mélange d'épices parmi lesquelles le piment séché à proprement parler, mais également de l'ail, du gingembre, des oignons rouges, de la graine de rue, de la cardamome, des clous de girofle ou encore de la cannelle.

    Cérémonie traditionnelle du café, Éthiopie

    Le wet peut être réalisé à partir de viande de bœuf, de poulet, d'agneau et dans certaines régions de poisson. Il peut également inclure légumes, pois cassés, pommes de terre, carottes et blettes. La viande peut aussi être servie sautée ou crue (ketfo ou gored gored) accompagnée avec du piment[32]. Une fois l'ensemble des plats disposés sur l'injera, chaque personne utilise un bout de cette-même galette pour se saisir des aliments. Il est possible qu'une personne porte la nourriture à la bouche d'une autre, il s'agit d'un signe d'amitié et de respect.

    Le t'ella est une bière traditionnelle brassée à partir d'orge ou de malt, de houblon et de feuilles de gesho, employée également dans la fabrication du t'edj — sorte d'hydromel qui accompagne souvent les plats éthiopiens[32]. Enfin, le café, probablement né en Éthiopie, occupe une place centrale dans la culture et les traditions nationales[32]. Il est servi, à l'aide d'une jebena, une cafetière locale, en toute fin de repas au cours d'une cérémonie où l'on brûle de l'encens. Les grains de café sont grillés sur place et l'ont fait sentir leur odeur aux hôtes. Dans la plupart des foyers, un espace tapissé d'herbes et dote de meubles dédiés est souvent agrémenté.